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eCes derniers temps, la réforme des retraites fait la Une. Mais une autre évolution va bientôt entrer en vigueur, malgré un traitement médiatique bien différent. Il s’agit de plusieurs mesures qui vont désormais encadrer l’assurance-chômage. Si ces changements arrivent sans faire trop de bruit, ils vont tout de même avoir de lourds impacts sur la vie quotidienne de nombreux Français. Réduction de la durée d’indemnisation, sanction en cas d’abandon de poste… Pôle emploi va à présent appliquer de nouvelles règles. Aussi, voici un petit point récapitulatif, pour savoir ce qui attend les demandeurs d’emploi à l’avenir.
Assurance-chômage : une durée d’indemnisation raccourcie
Ces changements prévoient de réduire la durée d’indemnisation selon l’état du marché de l’emploi. Il s’agit donc d’introduire un mécanisme, qui adaptera l’assurance-chômage, en fonction du nombre de personnes sans emploi. Pour résumer ce système, le Ministre du Travail a déclaré :
» Quand ça va bien, on durcit les règles. »
Pour déterminer si « tout va bien », les pouvoirs publics s’appuieront donc sur le taux de chômage.
- Avec taux de chômage inférieur à 9%, la durée d’indemnisation baissera de 25 %. Ainsi, une personne, qui auparavant aurait pu toucher ses allocations durant 24 mois, n’aura droit qu’à 18 mois d’assurance-chômage.
- Lorsque le taux de chômage dépasse 9 %, la durée d’indemnisation repasse à la normale. Ainsi, les personnes indemnisées pourraient à nouveau bénéficier de leurs allocations chômage, pendant aussi longtemps qu’avant, si le contexte économique se dégradait à nouveau.
Afin djustifier cette décision autour de l’assurance-chômage, Olivier Dussopt s’appuie plusieurs travaux de plusieurs économistes.
« C’est un effet classique de la littérature économique : on observe en effet que le taux de retour à l’emploi est très fort au début de la période, c’est-à-dire tout de suite après l’inscription. Il baisse ensuite de manière progressive et assez rapide, et il retrouve un niveau important juste avant la fin de la période d’éligibilité des droits.«
L’idée consiste donc à exercer plus de contrainte sur les bénéficiaires, les remettre plus vite au travail. Le Ministre explique donc qu’il faut :
« rapprocher ces deux pics pour accélérer le retour à l’emploi. »
Le retour à l’emploi à tout prix ?
Cette stratégie est pourtant décriée par d’autres experts, à l’image de Clément Charbonnier, professeur d’économie à l’Université Paris VIII.
» Le premier pic est le fait des personnes qui ont un profil qui leur permet de retrouver facilement un emploi. Ensuite, les demandeurs d’emploi restant au chômage ont plus de mal à trouver, d’où la baisse du taux de retour à l’emploi. En fin de période d’indemnisation, les demandeurs d’emploi baissent leurs aspirations, et acceptent des CDD courts, des temps partiels ou des emplois moins bien payés que ce qu’ils faisaient avant. Ceci génère le second pic. »
Cette évolution de l’assurance-chômage pourra donc passer par des sacrifices pour les Français. Ainsi, à l’avenir, ils devront revoir leurs exigences à la baisse… ou voir leurs allocations chômage s’arrêter.
Pénaliser les personnes après un abandon de poste, face à l’assurance-chômage
Dès le mois de septembre dernier, le Ministre du Travail estimait que Pôle emploi passait à côté des abandons de poste.
» Il y a une faille. (…) Un salarié qui procède à un abandon de poste a accès à des conditions d’indemnisation plus favorables qu’un salarié qui démissionne. »
Avec les changements qui vont désormais encadrer l’assurance-chômage, cette possibilité n’existera plus.
D’après Service public, la loi permettra d’assimiler les personnes qui abandonnent leur emploi à des démissionnaires.
» Un salarié qui abandonne son poste et qui ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure par l’employeur peut être considéré comme démissionnaire. » Cette nouveauté vise à sanctionner un comportement plutôt courant, d’après certains élus LR. « Le salarié qui veut quitter son emploi. […] Pour se retirer du marché du travail tout en ayant pour objectif de conserver un revenu, il ne va pas démissionner. Mais simplement ne plus revenir au travail. Afin que l’employeur, de guerre lasse, procède à son licenciement. »
Une fois la fin de contrat actée, ces travailleurs pouvaient alors obtenir des allocations via l’assurance-chômage. À présent, dans ce cas, comme dans le cas d’une démission, ils n’auront plus droit à l’indemnisation versée par Pôle emploi.
Refuser un CDI : un choix risqué
Jusqu’à présent, les salariés en CDD pouvaient tout à fait décider de pas rester auprès de leur employeur. Et ce, même si ce dernier proposait un CDI. En effet, un contrat à durée indéterminée suppose un certain nombre d’obligations comme le respect d’un préavis. Ainsi, lorsqu’un travailleur veut démissionner, il doit prévenir sa hiérarchie à l’avance. Et, en CDI, cette période peut aller de 15 jours à 3 mois, selon la nature du poste. Ainsi, si une personne ne souhaitait pas poursuivre sa carrière dans un certain environnement de travail, elle pouvait se contenter de refuser la proposition, pour bénéficier de l’assurance-chômage.
Dorénavant, plus questions de jouer à ce petit jeu. D’après le gouvernement, il s’agit d’une stratégie, pour abuser des allocations versées par Pôle Emploi. Là encore, ce changement de l’assurance-chômage a fait l’objet d’un vote des sénateurs LR.
« Dans un contexte de fortes tensions sur le marché du travail, il paraît difficilement acceptable qu’un salarié ayant refusé une offre de CDI à l’issue d’un CDD. Sur le même poste et avec la même rémunération puisse percevoir des allocations chômage. »
Un principe qui soulève même une question, puisque le travailleur se retrouve contraint à signer ce nouveau contrat, plus engageant sur la durée. Et ce, alors même qu’un contrat doit normalement s’établir sur la base d’un consentement mutuel.
Le durcissement des conditions d’accès à l’assurance-chômage s’inscrit dans la volonté du gouvernement, d’atteindre le plein emploi. En effet, les pouvoirs publics déplorent le fait que certains employeurs aient des difficultés à recruter. Et, dans ces conditions, les indemnités de Pôle emploi auraient un rôle « désincitatif. » Pour forcer le retour à l’emploi, les allocations seront donc désormais strictement encadrées. Mais cette décision ne pourra pas permettre de résoudre la problématique de l’emploi à 100 %. En effet, la France comptait près de 3 millions de chômeurs fin 2022, pour environ 373 000 offres d’emploi vacantes. De son côté, Olivier Dussopt a des ambitions plutôt raisonnables sur le sujet. Ainsi, il table plutôt sur « 100 et 150 000 retours à l’emploi » durant l’année 2023.